https://ici.radio-canada.ca/connexion-creation/entrevues/document/nouvelles/article/1755941/connexion-creation-theatre-numerique-en-vie-centaur

Merci Radio-Canada d’avoir exposé notre oeuvre En Vie sur votre site Web ! Nous en sommes extrèmement fière. Pour savoir un peu plus sur notre démarche, on vous invite à lire l’entrevue plus longue CI-DESSOUS

Comment vous est venu votre projet/idée?

La nouvelle réalité COVID a définitivement joué un rôle dans la création de notre projet En vie. À la base, il s’agissait d’un projet jeunesse appelé What Is Living que nous avions développé durant l’automne 2019, et présenté dans le cadre de l’évènement Saturday Morning Children’s Series au Centaur Theatre en février 2020. Le spectacle abordait de manière poétique, clownesque et philosophique les questions du deuil et de la mortalité. Puisque le projet avait vraiment résonné avec notre public et suscité des réflexions intéressantes, nous nous sommes dit qu’il valait la peine de le retravailler, de le pousser encore plus loin.  Grâce à la bourse du Conseil des Arts du Canada, l’opportunité s’est présentée. Dans le nouveau contexte de la pandémie, les thèmes de la pièce nous ont semblé d’autant plus pertinents et forts. Soudainement, la solitude, le deuil et l’isolement étaient des choses concrètes que nous vivions, et que beaucoup de jeunes vivaient également. Les questions qui étaient déjà au cœur du spectacle ont pris une toute nouvelle résonnance, encore plus forte. Comment faire face à la mort d’un grand-parent ? Comment faire la différence entre la présence et l’absence ? Comment est-ce que les objets et êtres vivants peuvent nous apporter du réconfort ? Nous avons réalisé que nous voulions réagir à cette réalité en tant qu’artistes, et développer une histoire qui parle de la mort aux enfants avec une approche joyeuse, décomplexée, sans détour.

Quels ont été les défis pour le réaliser?

Pour cette version du projet, notre plus grand défi était d’apprendre à gérer un projet conséquent sur peu de temps. Le volume de création était très important : écrire un texte de théâtre, l’enregistrer au complet, faire plus de 70 dessins et plus de 70 cues sonore. Il nous fallait donc nous rappeler l’importance de prioriser une vue d’ensemble plutôt de se concentrer sur les petits détails. Dans ce cours laps de temps, il nous a aussi fallu apprendre à maîtriser les outils à notre disposition (matériel technique, logiciels..) et à maximiser leurs possibilités.

Combien de temps vous a-t-il fallu pour le créer du début à la fin?

Depuis les premiers balbutiements du projet en septembre 2019, cela fait un an que nous pensons, créons et travaillons sur cette idée de projet qui raconte l’histoire d’une jeune fille en deuil et son poisson. En ce qui concerne la version numérique de notre spectacle, le projet nous a pris six semaines à réaliser. Sur celles-ci, nous avons pris deux semaines pour réaliser notre documentation, des entrevues et terminer la réécriture de la pièce. Par la suite, nous avons pris une semaine pour réaliser l’enregistrement et trois semaines pour finaliser les dessins, le montage sonore et la réalisation du powerpoint. 

Si votre projet est une représentation numérique d’une oeuvre d’art physique, décrivez-nous votre démarche.

Il y a deux pans de notre spectacle original que nous voulions particulièrement réinvestir dans notre version numérique : le texte et l’univers visuel. Le format numérique a néanmoins eu une influence majeure sur ceux-ci, puisqu’il nous a fallu presque tout réévaluer en prenant en compte les particularités du médium. Pas question de reprendre tout à l’identique ; il fallait laisser place aux impératifs du numérique.

Tout d’abord, nous voulions que cette deuxième version du texte donne la liberté au public de s’approprier l’histoire, s’amuser avec les personnages et prendre des décisions. Il fallait donc penser au texte autrement pour permettre ce genre d’interaction avec l’oeuvre. Nous avons donc retravaillé le texte pour laisser place à l’interactivité et créer des avenues différentes au sein du récit, à la manière d’un livre « dont vous êtes le héros ». Nous avons joué avec les possibilités que nous laissait cette forme pour inclure des péripéties et  informations supplémentaires au sein du spectacle, sachant que notre spectateur avait désormais le choix de se laisser guider là où il le préférait.

Dans la première version du spectacle, on retrouvait plusieurs moments de dessin « en direct » que nous  tenions à réimaginer sous forme numérique, en utilisant PowerPoint pour juxtaposer dessins et narrations. Nous avons ainsi pu reprendre certains de ces éléments visuels développés pour la scène. Également, puisque le dessin remplacait désormais notre scénographie, nous avons pu nous permettre une plus grande liberté dans la création des scènes et réaliser des atmosphères qu’il nous aurait été impossible de créer sur scène.

À l’égard de ces deux aspects, nous sommes très contentes d’avoir eu cette plus grande latitude créative et la possibilité d’aller plus loin avec notre oeuvre.

En quoi ce projet se démarque-t-il ou est-il spécial – pour vous, pour un auditoire potentiel?

Selon nous, ce projet se démarque car il est drôle, touchant, poétique et participatif. Nous parlons directement à nos jeunes lectrices et lecteurs et les invitons à faire des choix, à s’impliquer, à répondre et à exister au sein même de l’oeuvre. Il tient également un réelle pertinence sociale, puisque qu’il a été conçu comme une oeuvre d’art mais également comme un outil pédagogique.

Au-delà du fait que vous avez créé quelque chose pour un auditoire à distance, est-ce que les événements actuels ont influencé la genèse de votre projet de quelque façon que ce soit?

Oui, tout à fait. Notre projet traite de la question de la mort, mais expliquée aux enfants dans le cadre de la COVID par différents moyens littéraires, visuels, sonores et participatifs. En fait, la COVID est même inscrite dans la création et tient un rôle dans l’histoire. Au sein de celle-ci, la protagoniste, Brenda, raconte comment tout a basculé dans sa vie lors d’un jeudi pas comme les autres, soit le jeudi 12 mars 2020. Le récit relate la peur et la douleur de devoir faire face à la disparition de son grand-papa adoré, Grand-Papa Guy. Notre œuvre s’articule donc directement autour des événements de la COVID-19 et la manière dont cette crise a eu un impact sur les enfants et les jeunes.

En quoi ce projet est-il différent de ce que vous avez fait dans le passé?

Ce projet est différent de ce que nous avons fait dans le passé car il est entièrement numérique et se trouve à l’intersection de plusieurs formes (radio-théâtre, album jeunesse, livre interactif, film). Il se distingue également de nos autres projets par son ampleur : la quantité de dessins et de montages sonores à faire, ainsi que tout le travail d’assemblage, était plutôt impressionnant. Également, il nous a paru un peu étrange de travailler à distance. D’habitude, nous aurions répété ensemble, en personne, et présenté nos projets de théâtre en direct et devant public.

Comment êtes-vous devenu un artiste et pourquoi travaillez-vous dans cette discipline?

Nous sommes toutes les deux encore dans les débuts de nos carrières, mais nous avons longtemps su que nous étions des artistes et que nous voulions inventer des nouvelles formes, partager nos sensations et exprimer nos impressions sur le monde. Faire de l’art nous a semblé inévitable, nécessaire, vital. Pour Juliane, cela voulait dire s’exprimer à travers l’écriture, le dessin et le théâtre et se forger tranquillement une place dans la bande-dessinée à saveur sociale. L’art constitue pour elle un moyen d’exprimer son rapport au monde, et parler des réalités des choses qui l’entoure, notamment par rapport à des enjeux sociétaux. Pour Anne-Marie, le théâtre est rapidement devenu sa maison, son école et son refuge. C’est par le théâtre qu’elle a développé un intérêt pour la collaboration, la création communautaire et la juxtaposition des formes artistiques. Pour elle, le théâtre est le lieu où l’importance, la beauté et la force de l’art se révèle et prend son sens, dans le dialogue et le partage avec le public.

Written by Julien